Skip to main content

Les 100 pertes les plus importantes du secteur des hydrocarbures

Nitrate d’ammonium : une leçon à réapprendre?

Ce numéro du rapport 100LL coïncide avec le 20e anniversaire de l’explosion de nitrate d’ammonium survenue dans une usine d’engrais située près de Toulouse, en France, la dixième plus importante perte matérielle de l’histoire de l’industrie énergétique, ainsi qu’avec le 100e anniversaire de l’explosion de nitrate d’ammonium survenue à Oppau, en Allemagne, qui a fait plus de 500 décès.

Ce numéro du rapport 100LL coïncide avec le 20e anniversaire de l’explosion de nitrate d’ammonium survenue dans une usine d’engrais située près de Toulouse, en France, la dixième plus importante perte matérielle de l’histoire de l’industrie énergétique, ainsi qu’avec le 100e anniversaire de l’explosion de nitrate d’ammonium survenue à Oppau, en Allemagne, qui a fait plus de 500 décès. Malheureusement, depuis la publication de notre numéro de 2020, une explosion majeure de nitrate d’ammonium s’est produite dans le port de Beyrouth, au Liban, en août 2020. L’incident a entraîné des dommages matériels considérables et dispersés, et plus de 200 décès.

À chaque nouvelle perte, le grand public, les organismes de réglementation et les autres intervenants mettent davantage l’accent sur les mesures que prennent les organisations qui fabriquent, transportent et entreposent du nitrate d’ammonium pour éviter que de tels incidents ne se reproduisent. Bien que les sinistres décrits dans ce rapport s’étendent sur plus d’un siècle, un certain nombre de thèmes communs émergent, et indiquent une incapacité à soit apprendre du passé, soit s’assurer que les leçons tirées résistent à l’épreuve du temps.

Le nitrate d’ammonium sert principalement à la fabrication d’engrais et sert également de composant principal de certains explosifs. Il s’agit d’un solide cristallin blanc qui est stable dans des conditions d’utilisation normales, mais explosif s’il est soumis à des chocs ou à des températures élevées. Le nitrate d’ammonium est hygroscopique, c’est-à-dire que s’il est mal entreposé, il absorbe facilement l’humidité de l’air pour s’agglomérer ou se solidifier et devenir des amas plus importants, ce qui augmente davantage la concentration du produit et donc la gravité de toute explosion.

Oppau, Allemagne, septembre 1921

Deux explosions consécutives se sont produites dans un silo contenant environ 4 500 tonnes métriques d’engrais contenant du nitrate d’ammonium, causant plus de 500 décès et endommageant environ 700 maisons. Un certain nombre de changements ont permis de modifier le comportement du produit chimique pour le rendre plus explosif. En outre, ce qui aggravait davantage la situation déjà dangereuse, c’est qu’à l’époque, il était courant d’utiliser de la dynamite pour gérer l’agglomération. Le manque de sensibilisation aux dangers et l’inefficacité de la gestion du changement pendant le processus de fabrication, de même que l’entreposage dangereux et la proximité des zones urbaines ont été des facteurs déterminants qui ont mené à ce sinistre des plus catastrophiques.

Toulouse, France, septembre 2001

Une explosion majeure mesurant 3,4 sur l’échelle de Richter impliquant 400 tonnes métriques de nitrate d’ammonium non conforme aux spécifications est survenue dans une aire d’entreposage temporaire, causant 30 décès, environ 3 000 blessures ainsi que des dommages importants aux propriétés avoisinantes. Il est entendu qu’un certain nombre de catégories mixtes de déchets contenant du nitrate d’ammonium (pour les engrais et les explosifs) ont été combinées, sans qu’on ait pleinement évalué les dangers que ces matières présentaient. Ce scénario d’accident n’a pas été inclus dans le rapport de dossier de sûreté de cet établissement, et l’une des principales leçons tirées de cet événement a été l’obligation d’améliorer le processus de gouvernance des risques. La directive Seveso II a fait l’objet d’une importante mise à jour. Puis des mesures d’amélioration ultérieure ont donné lieu à la directive Seveso III, qui inclut l’identification des composés de nitrate d’ammonium non conformes aux spécifications et déclassés en tant que substances réglementées.

Beyrouth, Liban, août 2020

Cette explosion survenue dans un environnement non industriel a concerné 2 750 tonnes métriques de nitrate d’ammonium saisies d’un navire au port et entreposées pendant six ans dans un entrepôt situé à proximité, près de feux d’artifice et d’autres matières dangereuses, pendant qu’un différend sur la propriété de la marchandise était en cours de règlement. L’explosion a fait plus de 200 morts, 6 000 blessés et près de 300 000 sans-abri.

On a signalé que le nitrate d’ammonium avait été entreposé dans de grands sacs empilés les uns sur les autres dans un environnement humide. Par ailleurs, ils présentaient de grandes déchirures. Un incendie s’est déclaré dans l’entrepôt, mettant d’abord le feu aux feux d’artifice, avant d’atteindre la pile de nitrate d’ammonium.

Thèmes fréquents

Perception et sensibilisation des dangers. Dans chacun des incidents énumérés ci-dessus, les pratiques de travail indiquaient un niveau de tolérance au risque non sécuritaire ou un manque de sensibilisation aux dangers associés au nitrate d’ammonium.

Entreposage et manutention. Étant donné les caractéristiques inhérentes au nitrate d’ammonium, les conditions d’entreposage sont essentielles à la sécurité et à la stabilité du produit. Cela comprend l’utilisation de matériaux non combustibles, d’additifs anti-agglomérants, d’une ventilation adéquate et de gicleurs.

Proximité des zones urbaines. L’impact de chacun des incidents ci-dessus a été amplifié par la proximité du site d’entreposage avec des zones résidentielles. Dans un certain nombre de cas historiques, l’aménagement du territoire avait permis une urbanisation sans comprendre avec précision le pire scénario plausible pouvant survenir aux installations d’entreposage. Dans le cas de Beyrouth, la matière dangereuse a été apportée dans une région densément peuplée et laissée sans solution pendant un certain nombre d’années.

À la suite de l’incident de Beyrouth, l’équipe d’ingénierie des risques des services spécialisés de Marsh a publié un document détaillant les pratiques exemplaires et les leçons apprises relativement à la manutention du nitrate d’ammonium.

Explosions de nitrate d’ammonium : tirer des leçons du passé et les appliquer

Ce document vise à sensibiliser les gens aux risques, à examiner les leçons tirées et à fournir des conseils initiaux sur les documents et les règlements disponibles aux fins d’entreposage, de manutention et de transfert du nitrate d’ammonium.

Réflexion

L’histoire a démontré à maintes reprises qu’en tant qu’industrie, nous ne sommes pas vraiment parvenus à tirer les leçons du passé et à prévenir la répétition d’incidents semblables. Il existe de nombreux autres sinistres liés au nitrate d’ammonium lesquels ne sont pas abordés en détail dans ce rapport, notamment celui survenu en 1947 à Texas City aux États-Unis; celui qui s’est produit en 1998 à Xingping en Chine ou encore celui de 2004 à Barracas en Espagne et celui touchant la côte ouest des États-Unis en 2013. La publication 100LL de 2020 portait sur les défis liés aux leçons tirées des sinistres et sur l’importance de veiller à ce que les mesures d’atténuation des risques demeurent robustes. Les principaux points à retenir pourraient s’appliquer à tous les cas décrits ci-dessus :

  • Distance – application locale de la réglementation à la suite d’un incident qui touche la sensibilisation à l’échelle locale uniquement. De même, les parties peuvent être touchées par le biais de la proximité, c’est-à-dire qu’elles peuvent se sentir inconsciemment moins touchées par les événements qui surviennent dans des contrées lointaines.
  • Culture – la peur des litiges et des reproches empêche le signalement ouvert des incidents et les leçons tirées au sein des organisations. Dans certaines cultures, la difficulté de contester la direction peut également empêcher la mise en œuvre d’améliorations.
  • Vision étroite – les parties ne prennent pas conscience de la pertinence des leçons. La « pensée en silo » peut amener les entreprises à s’imaginer qu’un incident qui se produit dans un type d’installation différent de la leur ne fournit pas de leçons applicables.
  • Temps – les leçons apprises au départ ont été oubliées depuis, ou les solutions mises en œuvre n’ont pas été suffisamment maintenues. Ce constat est attribuable au départ de personnes d’expérience, à la perte de mémoire institutionnelle, à l’évolution du risque pour une usine vieillissante ou même à la simple complaisance.

Immédiatement après l’explosion de Beyrouth, des stocks similaires ont été découverts dans des ports du monde entier, y compris un de taille similaire au Sénégal auquel une solution a été rapidement fournie, ce qui a permis d’éviter un sinistre potentiellement sérieux de plus. Bien que cette prise de conscience soit positive à court terme, elle soulève encore une fois la question de savoir comment nous pouvons communiquer efficacement les pratiques exemplaires dans le monde, avant que des incidents ne se produisent. L’un des principaux objectifs de cette publication vise à aborder cette question. Comme toujours, pour éviter que l’histoire ne se répète, il est essentiel de faire part ouvertement des leçons tirées des sinistres et de les communiquer à nouveau dans une large mesure chaque année.

Les 100 pertes les plus importantes du secteur des hydrocarbures

Ce numéro présente également des réflexions sur les deux dernières années et donne aux professionnels de l’industrie de l’énergie un aperçu de l’éventail des pertes qui peuvent se produire, de la diversité des causes profondes potentielles, de la faillibilité des mesures de prévention et de l’ampleur des conséquences éventuelles.

Les services spécialisés de Marsh comptent plus de 800 conseillers spécialisés dans le secteur de l’énergie et de l’électricité, ingénieurs en gestion des risques et courtiers partout dans le monde. Communiquez avec nous pour discuter de solutions de gestion des risques efficaces pour votre entreprise.